EHESS Seminar in Paris

La Théorie critique au XXème siècle

Deuxième cycle, mai-juin 2020

Bernard E. Harcourt

Pour le Syllabus du séminaire, cliquez ici.

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Le séminaire cette année a été bouleversé—interrompu dès décembre 2020 par les mouvements sociaux nécessaires face à la réforme des retraites en France, immédiatement ensuite par la mobilisation des labos contre les réformes de l’université et de la recherche, et puis, depuis mars 2020, par la pandémie COVID-19 et le confinement.

L’idée, à l’origine, était de retourner aux fondements de la pensée critique contemporaine à travers de nouvelles lectures et interprétations d’une douzaine d’œuvres capitales de la théorie critique du XXe siècle. Nous allions lire ensemble afin de les repenser—et nous l’avions fait en partie en octobre et novembre—des textes fondateurs de la théorie critique : Théodore Adorno, « L’actualité de la philosophie » (1931) ; Max Horkheimer, « Théorie traditionnelle et critique » (1937) ; Simone de Beauvoir, Le Deuxième sexe (1949) ; Paolo Friere, Pedagogy of the Oppressed (1968) ; Althusser et al., Lire Le Capital (1965) ; Théodore Adorno, Dialectique négative (1966) ; et Michel Foucault, Les Aveux de la chair  (1984) au premier cycle. Après une réflexion sur La Société d’exposition (Seuil 2020) en janvier 2020, nous allions retourner à Hannah Arendt, La Condition humaine (1958) ; Jean-Paul SartreCritique de la raison dialectique (1960) ; Edward SaidOrientalism (1978) ; Gayatri Chakravorty Spivak, « Can the Subaltern Speak ? » (1988) ; et Judith Butler, Gender Trouble (1990) au deuxième cycle.

Ensemble, nous avions pourtant déjà changé de direction, en partie, en janvier 2020, pour réfléchir et penser et vivre d’une manière critique les mouvements sociaux et l’expérience de la mobilisation. Ensemble, nous avions transformé notre dernière rencontre, le 17 janvier 2020, en un collectif d’écriture. Ensemble, et séparément, nous avions écrit un texte collectif sur le site PEERS Press. L’introduction au texte, « Collectif du 17 janvier 2020 », proposait :

Ce texte est un devenir. Projet expérimental d’écriture collective.

Chaque modification dont il fera l’objet, chaque version, restera traçable tout au long de son existence, dans un processus collectif potentiel, et pour des singularités qui possiblement se retrouvent dans l’espace du texte et de la recherche.

Ce que nous avons appelé le Collectif du 17 janvier 2020 tentera de faire vivre ce texte. La question sera de savoir si le collectif peut exister dans une forme éclatée de la recherche et si l’écriture singulière peut coïncider avec l’inscription de soi dans le travail collectif de l’écriture.

Nous ne garantissons pas la réussite du processus. Il est ici avant-tout question d’engagement personnel – dans un travail de décomplexion face aux mots et à leurs effets – et pour une critique permanente de nos modes de pensée et d’être.

Chaque texte est anonyme et personnel. Toute modification est libre mais suppose la responsabilité de celui qui les engage.

Après quoi, nous nous étions séparés—moi de retour à New York pour donner cours à Columbia, vous pour continuer vos luttes, vos réflexions, vos séminaires à Paris.

Et puis, la pandémie COVID-19 nous a atteint au deux bords de l’Atlantique et a travers le monde. Depuis mars 2020, avec la pandémie et le confinement, notre monde a donc changé encore plus. Et nous faisons face, aujourd’hui, une nouvelle fois, à une assez ancienne réalité d’inégalité et de discrimination, de maladie, de tristesse, et oui, de la mort. À New York même, un résident sur 400 est décédé, plus the 20,000 personnes. Les morgues temporaires, en camions réfrigérés, nous accueillaient devants les hôpitaux.

Cette expérience de la pandémie a, pour moi, réorienté mes recherches et mes réflexions. Plus que jamais, il me semble, nous devons faire face non seulement à la pandémie COVID-19 et à la crise du changement de climat qui se cache derrière, mais frontalement à cette pandémie économique qui nous hante et atteint depuis des décennies, voire des siècles.

C’est pour cette raison que je propose, après une première leçon pour discuter trois auteurs dont nous nous étions mis d’accord et pour boucler le premier cycle, de réorienter notre séminaire vers une critique plus acharnée de l’économie politique. Dans cette vue, je vous propose de lire et penser les textes suivants :

  • Fernand Braudel, Les jeux de l’échange, Armand Colin, 1979 (Fernand Braudel, The Wheels of Commerce: Civilization and Capitalism 15th–18th Century, Harper and Row, 1982)
  • Karl Polanyi, The Great Transformation, Beacon Press, 1944
  • Michel Foucault, Naissance de la Biopolitique, Gallimard/Seuil, 2004
  • Bernard E. Harcourt, The Illusion of Free Markets, Harvard University Press, 2011
  • Philip Mirowski, Never Let a Serious Crisis Go to Waste, Verson, 2013
  • Thomas Piketty, Le Capital au XXIème siècle, Editions du Seuil, 2013 (Thomas Piketty, Capital in the Twenty-First Century, Harvard University Press, 2014)
  • Katharina Pistor, The Code of Capital, Princeton University Press, 2019

En liaison avec des textes classiques (Quesnay, Smith, Marx) ainsi que les textes suivants :

  • David Ricardo, On the Principles of Political Economy and Taxation, 1817
  • Pierre-Joseph Proudhon, Qu’est-ce que la propriété ? 1840 (Pierre-Joseph Proudhon, What Is Property, ed. and trans. Donald R. Kelley and Bonnie G. Smith, Cambridge University Press, 1994)
  • Pierre-Joseph Proudhon, Système des contradictions économiques, ou Philosophie de la misère, 1846 (Pierre-Joseph Proudhon, The System of Economic Contradictions, or the Philosophy of Poverty (1846), trans. Benjamin R. Tucker, Benj. R. Tucker, 1888)
  • Karl Marx, Misère de la philosophie. Réponse à la philosophie de la misère de M. Proudhon, 1847 (Karl Marx, The Poverty of Philosophy, with an introduction by Frederick Engels)

Lecture, textes & enregistrements (voir syllabus pour les détails)

Séminaire #1: Mardi 26 mai 2020, de 17 h à 20 h

  • Edward Said, Orientalism (1978)

 

Séminaire #2: Vendredi 29 mai 2020, de 17 h à 20 h

Séminaire #3: Mardi 2 juin 2020, de 17 h à 20 h

 

Séminaire #4:  Vendredi 5 juin 2020, de 17 h à 20 h

Séminaire #5:  Mardi 9 juin 2020, de 17 h à 20 h

Séminaire #6: Vendredi 12 juin 2020, de 17 h à 20 h